Mohamed Assaf : une icône pour la paix au Proche-Orient ?

Maryame Laaroussi
17 Août 2013



Alors que les négociations reprennent entre Palestiniens et Israéliens, le chanteur vedette gazaoui, Mohamed Assaf, vainqueur d'Arab Idol, appelle à la paix au Proche-Orient et porte la voix du peuple palestinien.


Mohamed Assaf embrasse le président Mahmoud Abbas | Crédit Photo – Mohamad Torokman / Sipa
Mohamed Assaf embrasse le président Mahmoud Abbas | Crédit Photo – Mohamad Torokman / Sipa
Le 22 juin 2013, Mohamed Assaf gagnait la deuxième édition d'Arab Idol à Beyrouth au Liban. Ce télé-crochet diffusé sur MBC (Middle East Broadcasting Center), équivalant de notre Nouvelle Star, a pour particularité de réunir l'ensemble des pays arabes dans le but de trouver le chanteur ou la chanteuse qui gagnera le droit de signer avec une maison de disque. Cet événement, très attendu dans le monde arabe, a connu un succès sans précédent et a créé un véritable engouement autour du jeune palestinien de 23 ans à peine, né en Libye, Mohamed Assaf. Avec une voix portante, un charisme digne des vrais professionnels et son attachement pour ses origines, le jeune homme a su toucher profondément une partie du peuple arabe.

Le show télévisé s'est, cette année, clairement transformé en scène politique pour les apatrides. Ainsi, la candidate kurde Parwas Hussein se disait fière de représenter le Kurdistan. Entrant en désaccord avec une membre du jury, d'origine émiratie, qui lui a demandé, en direct, de se présenter comme irakienne. La candidate a ainsi rétorqué « je suis du Kurdistan d’Irak » mettant un terme au débat.

De son côté, Mohamed Assaf s'est fait remarquer pour ne chanter presque exclusivement que des chansons palestiniennes à la gloire de son peuple. À l'heure du réveil arabe, ce jeune chanteur a su susciter l'émoi. Accueilli en héros à son arrivée au Caire puis à son retour à Gaza, d'où il est originaire. Beaucoup ont attendu de lui qu'il soit un représentant du peuple palestinien, faisant de lui l'ambassadeur de ce peuple à l'échelle internationale. Une euphorie générale que les représentants de l'Autorité palestinienne ont su exploiter en félicitant le jeune homme et en tentant d'entrer en contact avec lui. Mahmoud Abbas l'avait ainsi contacté alors qu'il n'était qu'un candidat pour lui montrer son soutien, le 7 juin 2013. Le premier ministre Salam Fayyad a, quant à lui, félicité le jeune homme sur son compte Facebook . Le Hamas n'a pas souhaité faire de communiqué sur la victoire de l'enfant du pays, prétextant que le télé-crochet est blasphématoire pour les valeurs de l'islam.

Depuis sa victoire, il n'a donc pas hésité à appeler à la paix entre Palestiniens et Israéliens ; mais surtout à l'unité du peuple palestinien. « La paix ne pourra aboutir que si le Fatah et le Hamas s'unissent », a-t-il ainsi déclaré.

« Mon moyen à moi, c'est d'être artiste »

Après s'être produit sur la scène du nouveau stade d'Hébron, Mohamed Assaf a déclaré « avoir une responsabilité énorme », auprès de son peuple. Il se présente ainsi comme le symbole d'une génération qui veut croire en une issue au conflit, pour un avenir meilleur. Bien au-delà de la position qu'il occupe au regard des Palestiniens, il est aussi le symbole de toute une génération arabe politisée, révoltée et quin'hésite plus à prendre la parole. Les populations arabes se sont donc retrouvées en lui et en ce qu'il incarne : le désir de liberté et de paix en plein printemps arabes. Pour lui, « il y a plusieurs moyens de faire la différence dans le monde ; mon moyen à moi, c'est d'être artiste ».

Mais quel avenir peut-on entrevoir pour ce jeune homme, clairement engagé et populaire ? Le chanteur s'est présenté jusque-là comme un pacifiste aux idées très générales, et affirme ainsi qu'il «  chante des chansons populaires pour donner de l'espoir », et qu'il est «  confiant », « je verrai un jour la Palestine libre ». Il appelle au retour des frontières de 1967, se plaçant ainsi dans la pensée majoritaire. Il exprime cependant, en ce début de négociations, son scepticisme quant à un potentiel accord sur le court terme. « Je n'ai aucune confiance en Israël pour le moment qui n'a fait aucun effort pour arrêter la colonisation et démanteler les colonies illégales », a-t-il affirmé. À nouveau, le jeune homme de 23 ans se charge d'exprimer la pensée populaire et décrit ainsi le climat ambiant côté Palestinien. Récemment Mohamed Assaf a été nommé Ambassadeur pour la paix par l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient. Un titre, certes honorifique, mais qui lui accorde un certain crédit et qui confirme son influence et sa popularité.

« Assaroukh » (la roquette), comme il a été surnommé au Liban, est porteur d'espoir pour toute une génération. L'impact et la médiatisation internationale qu'a eus sa victoire lui ont permis d'avoir une voix dans le conflit israélo-palestinien. Reste que Mohamed Assaf n'en demeure pas moins un chanteur qui appelle à la paix et non un diplomate. Il reste limité dans sa marge de manoeuvre politique, mais possède une influence importante sur les populations en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et dans les camps de réfugiés. La crainte à avoir le concernant, serait donc qu'il soit instrumentalisé par des partis pour porter des idées qui ne sont peut-être pas les siennes et qui chercheraient à se servir de sa popularité. Au vue, des problèmes qu'a connu Mohamed Assaf avec le Hamas par le passé (il s'était vu obligé d'arrêter de chanter dans la rue), l'absence de soutien du Hamas lors de sa victoire et son déménagement en Cisjordanie, il est fort improbable qu'il ne représente un jour les idées de ce parti.

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